Changement climatique : ce que nous indiquent les oiseaux
Notre planète en général, et la France en particulier, ont subi au cours des cent dernières années un réchauffement climatique brutal si on le compare aux variations historiques de températures. Ce réchauffement d’une amplitude de 1°C est attribué par un large panel de climatologues aux activités humaines qui génèrent des Gaz à Effet de Serre (GES). Les modèles climatiques prévoient pour le siècle à venir une amplification du phénomène de 2 à 5°C, dont l’ampleur et la rapidité dépendra de notre capacité à réduire nos émissions de GES. Un réchauffement d’au moins 3-4°C pour la fin du XXIème siècle semble cependant inévitable et mettra au moins 1000 ans à se résorber.
L’objectif de cet article est de faire le point sur les principaux impacts du réchauffement climatique en cours sur les populations d’oiseaux et, à travers eux, sur la biodiversité. Plutôt que de tenter l’impossible synthèse de centaines d’articles sur la question, nous nous appuierons sur trois exemples, dont deux auxquels nous avons directement contribué, qui illustrent ce qui nous semble être les trois phénomènes induits par le réchauffement climatique les plus déstabilisants pour la biodiversité dans nos contrées tempérées :
(1) la désynchronisation de la chaîne alimentaire ;
(2) la redistribution spatiale des espèces et
(3) la multiplication de phénomènes catastrophiques.
Nous terminerons par une réflexion sur le rôle de la biologie de la conservation dans ce contexte de changements climatiques.
Désynchronisation des chaînes alimentaires
Les changements climatiques prennent une signification particulière sous nos latitudes tempérées en modifiant la longueur relative des saisons. Or l’arrivée du printemps rythme le cycle annuel de toute la biodiversité. La remonté printanière des températures s’accompagne d’une reprise explosive de la végétation. Les jeunes feuilles fournissent une nourriture de qualité pour une multitude d’invertébrés herbivores, aux premiers rangs desquels les chenilles. Eux-mêmes sont alors consommés par des espèces insectivores, vertébrés (batraciens, lézards, oiseaux, petits mammifères..) ou invertébrés (coléoptères, araignées, ..), elles-mêmes proies de carnivores ou d’autres insectivores, chassés par d’autres prédateurs… Le formidable accroissement de la biomasse végétale va ainsi permettre à l’ensemble de ces consommateurs de se reproduire. Ce phénomène est cependant éphémère : les jeunes pousses tendres se chargent rapidement de tanin et deviennent indigestes. On assiste ainsi à un pic d’abondance de nourriture et chaque niveau de la chaîne alimentaire tente de se synchroniser sur le pic dont il dépend.
Il existe bien entendu une variabilité naturelle de la précocité du printemps et les différentes espèces ont développé des stratégies pour ajuster leur cycle de vie à cette variabilité. Pour les organismes dont la physiologie dépend directement de la température, comme les plantes ou les invertébrés, cet ajustement est relativement automatique et synchrone. Pour les autres (oiseaux par exemple), il s’agit de prendre une décision basée sur différents indices, parfois un bon mois avant le pic de chenille quand il s’agit d’initier la ponte.
Le réchauffement climatique modifie la précocité printanière en multipliant les printemps chauds et en amplifiant la variabilité naturelle de la précocité des saisons. Les espèces sont elles capables de s’adapter?
> Lire la suite de m'article sur le site de la Société Française d'Ecologie : R22 : La biodiversité face au réchauffement climatique par R. Julliard et F. Jiguet