Portrait de l'ODS : Fabrice Bonne
Fabrice Bonne est technicien à l’INRA [1] de Nancy depuis 1993. Des scientifiques de thématiques de recherche diverses font appel à ses compétences d’expérimentateur pour l’installation, le suivi et la gestion de dispositifs expérimentaux en forêt et au sein de plantations spécifiques. Son champ d’action s’étend sur la moitié nord du territoire Français. Certaines de ces plantations comptent plus de 44 000 arbres. Avec parfois 8 à 9 mesures par individus, cela peut prendre un mois pour venir à bout de la parcelle. Un travail considérable qui vient enrichir la base de données phénologiques de l’Observatoire !
Fabrice travaille quotidiennement aux côtés de scientifiques sur des projets concernant les forêts, le bois et le changement climatique. Pour mener ses expérimentations, il gère un vaste patrimoine de dispositifs, notamment des plantations comparatives d’espèces forestières. Situées dans le grand quart Nord Est de la France, ces plantations comparatives sont testées pour permettre d’évaluer la variabilité entre des essences d’origines géographiques différentes. Au total 13 essences forestières sont étudiées (chêne, hêtre, épicéa…). Ces plantations révèlent des différences génétiques en termes d’adaptation, de vigueur, d’aspect du tronc, de quantité de défauts, qualité du bois, résistance aux maladies, date de débourrement (ouverture des bourgeons de feuilles)… Cette dernière information est l’un des caractères majeurs pour sélectionner les sources de graines provenant d’individus ayant des débourrements tardifs, ce qui s’avère par exemple utile pour le reboisemment dans le nord de la France. Dans une région où des gelées tardives peuvent avoir lieu jusqu’à la mi-mai, planter un arbre au débourrement précoce pourrait causer des dégâts irréversibles sur l’axe de la tige, le rendant inapte à l’exploitation forestière. « Et en foresterie on veut des arbres qui poussent vite et droit ! ».
La phénologie 24h sur 24h, c’est possible ?
Avec les équipes scientifiques EPHYSE, Biogeco de Bordeaux et emmah d’Avignon, Fabrice étudie la phénologie de chênes sur 107 provenances différentes représentant l’intégralité de l’aire naturelle de cette espèce en Europe. Il observe 6 provenances contrastées en termes de débourrement végétatif (voir encart) avec une méthode peu commune. Des capteurs de lumière sont installés sous le feuillage et enregistrent en continu la baisse de luminosité au sol au fur et à mesure que les feuilles de l’arbre se déploient. Le système est donc automatisé. En parallèle, il continu d’observer à la jumelle le développement du couvert végétal de ces mêmes individus selon une codification universelle afin de vérifier le système. Et ça marche ! Seule zone d’ombre, les lapins et les sangliers ont eu faim cet hiver et les fils des capteurs sont à remplacer [2]…
Décalage phénologique en fonction de la provenance géographique : Entre 2 chênes sessiles de provenances différentes, on peut observer jusqu’à un mois de décallage dans les dates du débourrement végétatif.
Ces prochains mois
Le dispositif sera bientôt testé dans d’autres conditions. Les capteurs seront installés le long d’un transect altitudinal (cf. p3) en forêt de chêne dans les Pyrénées. En attendant, quand Fabrice n’est pas sur le terrain ou en train de rentrer ses données sur l’ordinateur, il forme à l’Observatoire des Saisons des étudiants de licences et des CPIE3 ! Pour le compte du GDR SIP-GECC, il assure depuis 5 ans le suivi phénologique de 150 arbres à l’Arboretum d’Amance situé à l’INRA de Nancy, sur une collection de 17 espèces communes aux autres Arboreta concernés par ce même projet.
- [1] INRA : Institut national de la recherche agronomique.
- [2] Depuis, les fils ont été remplacés et le lapin mangé !
- [3] CPIE : Centre permanent d’initiation à l’environnement